lundi 25 avril 2016

Le Saint-James, une autre idée de l’art de recevoir

Hôtel à part, unique, insolite, Le Saint-James a vu le jour en 1989 sous la houlette de Jean Nouvel. Avant-gardiste, l’architecte a imaginé le lieu tel un cocon de modernité au coeur des vignes et sur les hauteurs de Bordeaux, ville de cultures et de gastronomie...
  

Un parti pris audacieux qui mêle design et tradition, lignes épurées et nature, hospitalité et patrimoine. Un subtil cocktail qui rend Le Saint-James intemporel, immuable, tout en se laissant doucement patiner par le temps. Le tout à 10 minutes du cœur de Bordeaux et sa gare SNCF, 20 minutes de l’aéroport de Mérignac, 40 minutes de Saint-Émilion et une heure de route des plages d’Arcachon ou du Cap Ferret. 

UNE HISTOIRE A PART

Bienvenue à Bouliac. Ce village de 3 000 habitants se distingue par son église romane, ses palmiers, ses rues étroites, sa place principale et sa vue panoramique qui lui a valu le surnom de « balcon de Bordeaux ». Un site d’exception qui séduit, attire et fidélise. Après-guerre, déjà, Bouliac faisait l’objet d’escapades dominicales pour venir déjeuner, danser, changer d’air, s’échapper de la grande ville.


En 1989, l’une des plus belles longères XVIIIe de Bouliac a été transformée en hôtel avec restaurant. Une métamorphose que l’on doit au chef cuisinier Jean-Marie Amat, avec la complicité de l’architecte Jean Nouvel. Ensemble, ils ont redonné âme et vie à ce havre de paix, baptisé Le Saint-James, tel un clin d’oeil à la rue éponyme du centre historique de Bordeaux.

Quatre ans plus tard, Jean-Claude Borgel rachète l’établissement. Sans le dénaturer. Il garde les 18 chambres d’origine et maintient Jean-Marie Amat aux commandes du restaurant gastronomique. En 2002 Michel Portos, ancien chef de Troisgros à Roanne, succède à Jean-Marie Amat en tant que chef et directeur de l’établissement. En 2005, Jean-Claude Borgel est rejoint par sa fille Marie, qui devient PDG du Saint-James. Sa priorité : recevoir comme dans une maison de famille et faire de Bouliac non plus seulement un village magnifique, perché sur une colline qui domine la Garonne, mais aussi une destination pour gourmets, gourmands, flâneurs et amateurs d’art de vivre.

18 CHAMBRES & SUITES SIGNEES JEAN NOUVEL

Pour s’intégrer au mieux à la nature et à Bouliac, Jean Nouvel s’est inspiré des anciens séchoirs à tabac. Ainsi, aux abords de la longère d’origine, l’architecte a-t-il imaginé quatre pavillons calqués sur ces séchoirs d’autrefois, en recréant leur aspect rouillé et brut. Une galerie relie entre eux ces différents pavillons, pour faciliter la circulation. Mais pour surprendre aussi : par exemple, lorsque l’on pose son regard sur la longue vitre qui donne sur la cuisine et permet d’observer la brigade en pleine effervescence.

Les quatre pavillons abritent quinze chambres et trois suites, réparties sur trois niveaux. Leur point commun : elles sont toutes pourvues d’immenses baies vitrées, qui offrent une vue unique sur les vignes, la Garonne et Bordeaux. Dans les chambres et suites, tous les codes de l’hôtellerie volent en éclats. Avec Jean Nouvel, le blanc domine : symbole de la pureté, de la simplicité. Le dressing est ouvert et les baies vitrées sont nues : leur unique parure, c’est la vue sur la nature. Au sol : du béton brut. Sur les murs : du marmorino sur lequel la lumière du jour se reflète. Quant au lit, il livre un spectacle à couper le souffle. Et pour cause : il change de hauteur d’une chambre à l’autre, afin d’offrir une vue imprenable sur les vignes, une fois couché. Ajoutons à cela une multitude de délicates attentions : chaîne stéréo, minibar, machine à café, télévision, climatisation, wifi et produits d’accueil griffés Hermès. Dormir au Saint-James relève de l’expérience, du jamais vu, du rarement vécu.

À propos des suites, elles ont des allures de lofts et chacune – d’une superficie de 70 m2- revendique sa propre personnalité. À l’instar de la suite « Harley-Davidson », située en rez-de-chaussée, avec terrasse face aux vignes et véritable « Harley » en guise d’objet de déco près du lit. Quant à la suite « Jacuzzi », comme son nom l’indique, elle dispose d’un jacuzzi installé sur une immense terrasse en teck, qui domine les vignes, le parc, Bordeaux, sans oublier le point de vue unique sur l’église romane de Bouliac.

Enfin, côté mobilier, place aux créations de designers : Le Corbusier, Charles Eames, Philippe Starck… et Jean Nouvel. L’architecte a dessiné des fauteuils en exclusivité pour l’établissement de Bouliac. Ces assises baptisées Saint-James sont aujourd’hui des classiques du design : en 2011, Ligne Roset les a rééditées et estampillées Jean Nouvel. Jean Nouvel sort du cadre Originaire du Lot-et-Garonne et ancien élève des Beaux-Arts de Bordeaux, il y avait une logique à ce que Jean Nouvel réalise son premier hôtel à Bouliac. En 1989, l’architecte accepte de relever le défi. Il sort alors de tout cadre et imagine un établissement ouvert sur la nature. Il veut montrer les vignes, les mettre en valeur, comme une oeuvre d’art, un trésor. Cette prouesse architecturale, aussi atypique qu’esthétique, a été classée au patrimoine du XXe siècle par le ministère de la Culture.

UNE TABLE ETOILEE RICHE EN EMOTIONS SIGNEE NICOLAS MAGIE

Il s’affranchit de tout. Son seul guide : les produits. Et cela se vérifie tout au long du parcours de Nicolas Magie : de ses performances aux côtés de chefs qui font référence —Michel Gautier, Michel Carrère, Denis Franc, Christian Constant...— et dans des maisons de prestige —la Chamade et le Pavillon des Boulevards à Bordeaux, le Miramar à Biarritz, le Crillon à Paris…—, jusqu’aux cuisines de son propre restaurant, La Cape, à Cenon. C’est là qu’il décroche sa première étoile en 2004. Treize ans plus tard, ce natif de Bordeaux, élevé par deux générations de cuisiniers, va rester sur la rive droite de la Garonne et investir les cuisines du Saint-James. Un nouveau challenge, à ses yeux. Mais il aime autant les défis que sa région. L’un des meilleurs moments de sa journée : les arrivages du matin préparés par « ses » producteurs locaux, qu’il appelle tous par leur prénom.


Un brin électron libre, sa cuisine lui ressemble : elle mêle justesse, sincérité, authenticité, mais aussi poésie et fantaisie. Ce qui l’anime ? « Susciter de l’émotion ». Pour cela, Nicolas Magie n’hésite pas à miser sur l’amertume et l’acidité, y compris dans certains desserts. Avec lui, le turbot se marie avec celtuce, radis et chipirons. L’agneau de lait fait bon ménage avec anchois et petits pois. Quant au concombre, il peut le détourner en dessert en lui associant, par exemple, un croustillant de mousse au fromage blanc.

Enfin, le chef du Saint-James dispose d’un terrain de jeu fabuleux pour mettre en valeur ses créations. À savoir : une salle de restaurant conçue tel un jardin en terrasses, qui épouse idéalement la dénivellation de la colline. Habillée de baies vitrées, la salle fait face à des rangées de merlot et à Bordeaux, la majestueuse. Le tout dans un décor épuré, dessiné par Jean Nouvel. Enfin, au coucher du soleil, murs et plafond en marmorino changent de couleur, tout en douceur : un enchantement.

LA CUISINE, UN CAS D’ECOLE

Elle s’appelle Côté-Cours. C’est le nom de l’école de cuisine du Saint-James. Ici, on apprend petits trucs et astuces de grands chefs. Avec Célia Girard aux manettes. Sous-chef de l’étoilé Nicolas Magie, elle transmet sa passion pour les produits locaux, les curiosités du marché du jour. Le tout dans une déco et un décor qui inspirent : située dans une véranda, l’école est à la fois spacieuse, lumineuse et conçue autour de deux grands îlots tout en corian immaculé. Quant aux fours et autres tables de cuisson, ils viennent de la maison Miele. Du sur-mesure pour apprendre à concocter recettes savantes, mais aussi club sandwich ou autres douceurs salées et sucrées pour un brunch dominical.

Quant à la dégustation, elle a lieu autour d’une table ronde. Comme à la maison, entre amis. Une façon originale et pertinente de partager ce que l’on a préparé et de continuer à échanger avec Célia Girard. Enfin, avant de partir, un détour par la boutique s’impose. Ici, on trouve toute une sélection d’ustensiles utilisés durant les cours et griffés Toc, Chomette & Favor, All-Clad, épices Roellinger… Idéal pour refaire et réussir les bons gestes du chef, une fois de retour chez soi.

CAFE DE L’ESPERANCE

Annexe du Saint-James, le Café de l’Espérance est une véritable institution à Bouliac. Côté déco : chaises et tables en bois, cheminée, tonnelle –chauffée en hiver– et terrasse ombragée, située face à l’église romane du village.

Sur l’ardoise, posée contre le comptoir : viandes rôties, frites « maison » et une invitation à se laisser tenter par deux buffets. Celui des entrées. Celui des desserts. Où l’on se sert comme chez soi. Sans chichi. À volonté. Une des curiosités sucrées à ne pas manquer : les cannelés, concoctés par un pâtissier qui officie depuis quarante ans dans les cuisines du Café de l’Espérance. D’aucuns disent que ce serait « les meilleurs cannelés de Bordeaux »… Mais le Café de l’Espérance, c’est aussi l’accueil, le service, les rires et les sourires. On peut y venir en solo, en duo, en famille, entre amis, on ne s’y sent jamais seul ni perdu dans un coin de salle. Une illustration, à la fois sympathique et bucolique, du savoir recevoir 7 jours sur 7, durant toute l’année.

AU CŒUR DES VIGNES

Le vin est au coeur de la vie du Saint-James. D’abord avec le responsable de la restauration et chef sommelier, Richard Bernard. En 1996, il a été nommé « meilleur jeune sommelier de

France », puis en 1997, « meilleur sommelier de France ». Aujourd’hui, au Saint-James, il veille sur une cave de quelque 20 000 bouteilles et 2 000 références. Avec une carte riche en vins de la région bordelaise. Mais Le Saint-James c’est aussi un parc de 4 hectares qui abrite 950 pieds de vigne. Ce serait le deuxième plus petit vignoble de la région bordelaise en AOC, juste derrière celui de… l’aéroport de Mérignac.

Répartis aujourd’hui sur 12 ares, ces pieds de vigne sont tous exposés plein ouest et nichés à 90 mètres d’altitude. Ce qui a été planté ? Uniquement du merlot. Autrement dit : au Saint-James, on ne produit que du vin rouge, baptisé en toute simplicité le « Vin-du-Jardin ». Cette production quasi confidentielle se limite à quelque 600 bouteilles « les bonnes années ». À l’instar de 2013, où 450 bouteilles du « Vin-du-Jardin » ont été proposées à la carte du restaurant, ainsi qu’à la boutique de l’hôtel.

Plus singulier encore : Le Saint-James dispose de son propre chai. Il s’agit de deux caves aménagées, qui permettent de produire dans les mêmes conditions que les professionnels. Le tout sous l’œil vigilant du vigneron-consultant Stéphane Derenoncourt, chargé de vinifier le « Vin-du-Jardin ». Et qui dit chai, dit aussi vendanges. Celles-ci ont lieu chaque année en début  d’automne. Les clients de l’hôtel y sont conviés. Une façon originale de s’immiscer dans la vie du Saint-James, découvrir et comprendre le travail des vendangeurs, des vignerons, du sommelier. Une sorte de voyage initiatique qui se termine par un barbecue sur la terrasse de l’hôtel, face aux lumières de Bordeaux. Une expérience unique. Au cœur des vignes.

Le parc du Saint-James dispose d’une piscine chauffée, voisine des pieds de vigne. Il s’agit d’un élégant couloir de nage, long de 25 mètres, dessiné par Jean Nouvel et reconnaissable à
son inattendu liner noir. Un choix audacieux et d’avant-garde à l’orée des années 1990.

UNE OUVERTURE SUR LA CULTURE

Depuis son ouverture, Le Saint-James a misé d’emblée sur la culture, les arts, l’architecture, le design... Avec le choix de Jean Nouvel, bien sûr. Mais aussi en sollicitant le sculpteur César pour inaugurer, dès 1989, les premiers « 16 ares » de vignes plantés dans le parc de l’hôtel. Puis, au fil des années, la galerie qui relie la longère XVIIIe aux pavillons s’est vue transformée et aménagée en espace dédié à l’art. À raison de quatre expositions par an, peintres, sculpteurs, photographes… se succèdent. Et ce, jusque dans le bar de l’hôtel.

Ce bar à part, rénové en janvier 2012, accueille donc des expositions temporaires d’artistes. Mais il se distingue aussi par sa profusion de pièces de mobilier de designers. Avec quelques grands classiques, tels que des fauteuils, canapés et chaises signés Jean Nouvel, Verner Panton, Charles Eames… Sans oublier l’étonnante bergère Louise Crusoé, dessinée par Bleu-Nature, aux allures de nid perché dans les arbres. Le temps d’un café, à l’heure du thé ou pour un dernier verre, ce bar s’ouvre également sur la terrasse de l’hôtel. Dernier atout : il offre, lui aussi, une vue sur Bordeaux et les cimes de la grande forêt des Landes. La nature à perte de vue.

Informations : Saint-James 3, Place Camille Hostein 33270 Bouliac, tél. 05 57 97 06 00- www.saintjames-bouliac.com


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